La paire de la semaine, du mois, de l'année

En mai, skate avec les chaussures qui te plaisent (le reste de l’année aussi d’ailleurs).

Chaque mois pour coze.fr, Sneakers Empire vous propose de découvrir ou redécouvrir une paire de speakers ou d’enrichir votre culture sneakers. Même si ce n’est pas le cas cette année, le mois de mai reste celui du NL Contest. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé de vous parler des chaussures de skate.

Dans sa chanson « Vans », le rappeur The Pack dit « Got my Vans on, but they look like sneakers », traduction « Je porte des Vans mais elles ressemblent à des sneakers » Qu’est-ce qu’il veut dire avec ces paroles ? Je vais essayer de répondre à cette question en quelques lignes.

La Californie, terre des skateurs et des marques de skate

Un peu d’histoire pour commencer. Le skate nait dans les années 50 en Californie et à Hawaï. Les surfeurs cherchaient autre chose à faire quand l’océan ne voulait pas d’eux. Ils ont l’idée de fixer des roulettes sous une planche en bois. Dès la fin des années 50 la marque Roller Derby, qui fabriquait des rollers, fabrique le premier skate à une échelle industrielle et le distribue aux Etats-Unis. Le premier magazine de skate « The Quarterly Skateboarder » sort en 1964 et le premier skatepark est construit en 1976. En Europe l’histoire du skate démarre au milieu des années 70 en Allemagne, à Munich plus précisément (apporté par les militaires américains). 1978 marque un tournant avec l’invention du « Ollie », la fameuse figure d’Alan Gelfand qui va faire passer le skateboard des skateparks  à la rue. Le streetskateboarding a son magazine, le aujourd’hui célèbre, « Trasher » qui parait pour le première fois en 1981. Mais les années 80 marquent surtout l’arrivée d’un média qui va tout changer, la vidéo.

La vidéo a été très vite largement adoptée par les skaters

Elle se développe très vite au sein des skateurs, fait exploser cette pratique aux Etats-Unis et donne une visibilité extraordinaire aux meilleurs skateurs du monde. Pour eux, il est alors possible de vivre de cette passion tout comme pour les sociétés créées dans ce milieu. Ainsi, Powell Perralta, Vision Street Wear, Santa Cruz et bien d’autres commencent à gagner beaucoup d’argent. Les marques de chaussure ne sont évidemment pas en reste, Vans en tête. Mais à la fin des années 80, le skate connait une baisse de pratique due à la détérioration des skateparks. Ces derniers ont un design qui résiste mal au temps et les assurances sont trop chères pour prévoir leur réparation. Beaucoup de skaters pro se retrouvent alors sans ressources. Ils ont alors l’idée de construire des « half pipes » (demis tuyaux) dans leurs cours et leurs jardins et le skate repart ainsi en force. Il ne s’arrêtera plus !

Les tous premiers skateurs utilisaient la quasi unique chaussure de sport disponible à cette époque, la Converse All Star (encore aujourd’hui)

Quelques années après la naissance du skate, en 1966, la société Vans voit le jour quand le créateur de la marque Paul Van Doren et 3 associés ouvrent un premier magasin dans lequel ils fabriquent les chaussures le matin puis les vendent l’après-midi. La légende veut même que les 12 premières chaussures ont été vendues en une journée et que les 12 acheteurs n’ont payé que le lendemain parce que les vendeurs n’avaient pas prévu de monnaie à leur rendre pour faire l’appoint !

Produire et vendre au même endroit

Le tout premier modèle s’appelle Authentic aujourd’hui, « numéro 44 » à l’époque. À ses débuts, il n’y avait aucun nom de modèles, juste des numéros. La marque rencontre immédiatement le succès auprès des skateurs grâce à  des chaussures très solides et avec une bonne accroche. Un autre modèle, la Slip On, va tout changer. En 1982, sa version à damier (« checkerboard ») se retrouve aux pieds de l’acteur Sean Penn dans le film « Fast Times at Ridgemont High » (« Ça Chauffe au Lycée Ridgemont », magnifique traduction ndlr). Succès national et international pour ce film… et pour Vans ! Mais la réussite monte très vite à la tête des propriétaire de Vans du moment. Ils se mettent à créer de nombreux produits pour se diversifier voulant rivaliser avec adidas ou Nike. Basketball, baseball, lutte et même parachutisme, tout y passe ! Sauf que les ventes ne suivent pas et ce virage entraine la faillite de l’entreprise.

Vans fabriquait aussi des chaussures de parachutisme !

Le tribunal donne une dernière chance aux propriétaires à une condition, qu’ils fassent revenir le créateur Paul Van Doren qui avait pris du recul depuis quelques années. Il accepte et sauve la marque qui est aujourd’hui une des plus profitables au monde. Une des raisons de son succès réside dans sa capacité à écouter ses consommateurs. Les exemples sont nombreux mais l’anecdote qui va suivre le démontre parfaitement. En 1988, Vans approche Steve Caballero, un des meilleurs skateurs au monde pour créer un modèle à son nom, la Vans Caballero High Top. La chaussure est influencée par la Vans #138 et les Air Jordan que lui et beaucoup de skaters portent à l’époque. Lance Mountain, membre de la fameuse Bones Brigade fondée par Caballero, dira même que c’est la meilleure chaussure de skate jamais créée. On retrouve sur la Caballero High Top un effet peau de dragon qui est ajouté comme un clin d’oeil au symbole de Caballero déjà visible sur ses planches Powell Perralta. Au début des années 90, c’est Caballero lui-même qui remonte l’information à Vans que les skaters de rue modifient sa chaussure en coupant la partie haute du col et en y ajoutant du scotch la rendant ainsi plus « skatable ». Vans l’entend et fait la modification donnant ainsi la Vans Half Cab en 1992. Anecdote dans l’anecdote, l’année des 20 ans de la paire, des éditions limitées sortent tous les mois dont une très limitée à 20 paires coupées et scotchées par Steve Caballero lui-même, vendues exclusivement chez Supreme.

La folie des éditions limitées touche aussi les marques de skate

Car oui, les marques de skate (et Supreme en tête) ont elles aussi adhéré au principe des séries limitées faisant passer les chaussures de skate des skateparks à la rue et plus souvent aux placards.Il faut dire que les chaussures de skate, comme la plupart des chaussures de sport, ont très tôt connu ce qu’on appelle le détournement d’usage. C’est le phénomène qui décrit le fait de porter une paire de chaussures de sport pour autre chose que pour la pratique du sport pour lequel elle a été créée, ici, pour être portées par des personnes qui ne monteront jamais sur un skate ! Etnies (marque née en France en 1986), DC Shoes et Vans ont bénéficié de cette forte tendance dans les années 90. Aujourd’hui, c’est Vans qui truste ce marché. L’autre marque qui connait aussi cette tendance est l’inévitable Nike avec sa division SB (SkateBoarding) et en particulier la Dunk SB. Adidas n’est pas en reste avec son modèle phare, la Busenitz, modèle créé pour le skateur du même nom,ou les paires en collaboration avec un autre grand skateur, Mark Gonzales. L’influence de ces marques dans le skate fera l’objet d’une prochaine chronique.

La marque Vans pourrait aussi faire l’objet à elle seule d’une nouvelle chronique tant elle a marqué et marque encore l’histoire du skate et tant elle fait aujourd’hui partie du business des sneakers. Il est assez incroyable de penser que la Vans Era (#95), est toujours utilisée pour skater, plus de 40 ans après sa création !

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